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Il ne faut pas que les Africains redoutent cela. Moi, je propose justement des solutions pour nous éviter de telles craintes. Quand vous demandez un prêt à un ami, il accepte de vous prêter l’argent parce qu’il a un surplus. Mais, s’il est lui-même en difficulté, il ne peut pas laisser sa femme et ses enfants dans le besoin pour vous venir en aide.

Il faut que les Africains comprennent que le monde est régi par une loi naturelle. Il n’y a donc pas à redouter quoi que ce soit. Quelles sont les précautions que nous prenons ? Je leur dis ceci : nous avons des richesses dont nous pouvons convertir une partie en fonds. Au lieu de redouter l’impact sur la coopération, nous pouvons créer une coopération que nous pourrons inverser à la longue.

C’est-à-dire !

C’est-à-dire qu’aujourd’hui les institutions financières de l’Ouest empruntent à l’Arabie Saoudite et aux pays pétroliers, arabes. Pourtant, ces pays sont considérés comme des pays du tiers-monde. A Djeddah, il y a des banques comme la BID, la Badea. Au Koweït, il y a le fonds koweitien, etc. Dans ces pays, vous trouverez des gens qui viennent des pays développés pour négocier le placement de capitaux arabes dans les banques occidentales.

J’appelle cela une coopération inversée. Des pays développés qui sollicitent des fonds des pays sous-développés pour maintenir un niveau de développement. Voilà ce que je souhaite pour notre continent. Je veux que nous créions un pôle en Afrique qui puisse nous permettre de financer nos infrastructures, nos écoles, nos hôpitaux et nos dispensaires. D’autres pays pourraient, pourquoi pas, emprunter avec nous. Il nous faut absolument mettre en place ce fonds qui sera alimenté par des prélèvements sur nos matières premières. Les Arabes n’ont pas fait autre chose. Nous voyons les résultats positifs. Pourquoi serions-nous moins intelligents qu’eux ?

A l’ère des ruptures économiques, pensez-vous que le rôle des ensembles économiques régionaux va s’accroître ?

Ou, au contraire, y aura-t-il un risque que le « chacun pour soi » s’installe ? Je pense que certains seront tentés par le « chacun pour soi ». Mais cela ne va pas prospérer à cause de la démographie. Au moment où nous accédions à l’indépendance, il y a 48 ans, la Côte d’Ivoire et l’Afrique de l’Ouest, en général, n’étaient pas très peuplées. Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire est passée de 3 à 20 millions d’habitants. Et ces 20 millions d’habitants circulent. Donc, ne serait-ce qu’à cause de la circulation des personnes, qui vont toujours là où elles ont des intérêts, nous sommes obligés de faire un minimum de réflexions et de règles en commun. Et ces règles s’imposent. Aujourd’hui, je suis fier lorsque je vais dans certains pays africains et que je rencontre des cadres ivoiriens qui dirigent des institutions financières et bancaires. Nous voyons aussi chez nous des cadres d’autres pays, occuper des fonctions importantes. Je pense que le phénomène de la démographie et de la mondialisation fait que nous sommes obligés de tourner, de plus en plus, le dos au « chacun pour soi ».

Excellence, la Côte d’Ivoire a un rôle qui demeure important sur la scène régionale. Selon vous, comment votre pays peut contribuer à la résorption des crises, ne serait-ce qu’au niveau de la sous- région ?

D’abord par sa sagesse. Nous avons participé à la création de toutes les institutions qui existent. Mais aucun chef d’Etat ivoirien n’a jamais demandé ni exercé les fonctions de président du Conseil de l’Entente, de l’Uemoa, de la Cedeao, de l’OUA et de l’UA. Cela est un signe de sagesse. Qui évite les batailles pour des postes. Et puis, la Côte d’Ivoire a un rôle important dans la production agricole. Pour qu’elle maintienne son rang de principal catalyseur économique de la sous-région, il faut premièrement qu’elle passe au stade industriel.

Et deuxièmement au stade de l’exploitation minière. Nous devons abandonner l’exploitation artisanale pour passer au stade de l’exploitation industrielle. Sans pour autant délaisser l’exploitation agricole.

Troisièmement, il faut accroître le champ, en mettant l’accent sur le pétrole. Pour le moment, je peux dire que les choses vont bien au niveau du pétrole. Mais nous avons encore quelques retards à l’allumage, sur un certain nombre de puits. Je crois toutefois, que d’ici à trois ans au plus, nous aurons une exploitation qui pourra nous garantir une stabilité. C’est ainsi que la Côte d’Ivoire pourra demeurer ce qu’elle est.

Il y a surtout le fait que la Côte d’Ivoire est la porte d’entrée et de sortie vers l’extérieur, pour une grande partie des pays d’Afrique de l’Ouest, par son port et son aéroport. Ce rôle doit être accru. C’est pourquoi, nous avons pris des dispositions afin de multiplier la capacité du port par trois. Les travaux d’étude sont terminés. Nous allons bientôt lancer les travaux de transformation de « l’île Boulay » en zone portuaire intégrale. Ainsi, la Côte d’Ivoire va continuer à être la grande porte d’entrée et de sortie des trois quarts de l’Afrique de l’Ouest vers l’extérieur. Cela est une donnée économique non négligeable.

En 2000, le port d’Abidjan a traité 14 millions de tonnes de marchandises. J’avais alors dit au directeur général Marcel Gossio qu’il fallait que d’ici à 5 ans, nous soyons à plus de 20 millions de tonnes. Parce que notre concurrent direct, c’est le port de Durban en Afrique du Sud. Aujourd’hui, nous sommes à 21 millions de tonnes. Nous progressons donc. Mais il faut que cette progression soit marquée, non pas seulement par l’équipement existant, mais aussi par l’accroissement du port lui-même.

D’où la nécessité, en dehors de l’extension du port, de la création du pont, du prolongement de l’autoroute jusqu’à Yamoussoukro. Les gens se demandent où vous trouvez tout cet argent. Surtout que le pays est en crise. Il y a même une polémique qui est née dernièrement sur le financement de certains travaux, à partir de puits de pétrole concédés. Monsieur le président, qu’avez-vous à répondre ?

Vous voyez bien que ces polémiques ne vont pas loin. Il y a plusieurs manières de payer. J’ai décidé de payer avec ce que j’ai. C’est-à-dire avec le pétrole de la Côte d’Ivoire. Ce n’est pas ce qui est remis en cause. C’est la traçabilité qui n’était pas très lisible. J’ai demandé aux techniciens de réparer cela. Ils l’ont fait. J’ai signé tous les textes qu’il faut et maintenant, la traçabilité et la lisibilité sont parfaites. Je ne veux pas endetter la Côte d’Ivoire. Je ne veux pas dépendre des institutions financières extérieures pour faire ce qui est indispensable. Je parle du transfert de la capitale à Yamoussoukro et la construction du port. Je prends notre richesse, c’est-à-dire le pétrole, et je paye. Cela n’est pas remis en cause.

A propos de ces grands travaux, je voudrais rappeler aux uns et aux autres que c’est l’économiste Keynes qui a développé la théorie des grands travaux. Cette grande théorie keynésienne a servi aussi bien à Staline qu’à Roosevelt. Chacun, pour le compte de son pays, a appliqué la théorie de Keynes. Staline a conduit de grands travaux partout dans l’Union soviétique. Ce qui lui a permis de créer des milliers d’emplois. Idem pour Roosevelt.

Ce n’est donc pas une théorie nouvelle. D’ailleurs, je ne suis pas un théoricien de l’économie. J’applique ce qui existe déjà et qui est bien. Je continuerai donc à faire les grands travaux.

Monsieur le Président, quelle est votre vision des 5 prochaines années sur notre sous-région ?

Nous devons beaucoup travailler pour la jeunesse dans les 5 et 10 prochaines années. Si nous avons une jeunesse désespérée, nous aurons des guerres civiles. Avec des raisons plus ou moins farfelues. La Côte d’Ivoire fera sa part. C’est pourquoi, je préconise que l’agriculture serve à l’industrialisation. Et qu’avec le cacao, nous créions deux fois plus d’emplois. C’est-à-dire que nous maintenions les emplois agricoles, mais que nous créions à partir des mêmes produits, des emplois industriels et commerciaux à l’exportation. Les autres devront faire autant. Le problème des 10 prochaines années, c’est celui de la jeunesse, c’est-à-dire celui de la création d’emplois, j’allais dire le problème de la transformation de l’économie.

Tout est lié. Et je souhaite que chacun des Etats pense à cela. La plupart des Etats de l’Afrique de l’Ouest ont connu ou bien des guerres civiles ou bien des coups d’Etat. Le Nigeria, le Bénin, le Togo, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Liberia, la Sierra Leone, la Guinée Bissau, le Sénégal, la Haute Volta devenue le Burkina Faso, le Niger, le Mali, la Mauritanie… Tous les Etats de l’Afrique de l’Ouest ont connu des guerres civiles ou des coups d’Etat. Il ne s’agit pas de faire une incantation, en disant les coups d’Etat ou les guerres civiles sont mauvais, pour les proscrire. Il faut créer les conditions pour que les jeunes se sentent intégrés aux économies nationales.

C’est pour cela qu’au niveau de l’Uemoa et de la Cedeao, nous devons aller plus loin, dans l’intégration. Aujourd’hui, ce qui touche un pays en Afrique de l’Ouest touche forcément tous les pays. Il faut donc que nous discutions. Mettons le cap sur la jeunesse, c’est-à-dire sur sa formation et son intégration dans le tissu économique. Nous devons nous atteler à la transformation de l’économie pour la rendre plus compétitive.

Interview réalisée par Jean-Baptiste Akrou et alakagny hala

Références bibliographiques:

Aucune.

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